Claude Monpoint

Je m’appelle Claude Monpoint, né au Havre le 3 septembre 1931. Mes parents émigrent aux Etats-Unis en 1927. Crack boursier en 1929. Ma mère revient au Havre le 1er juillet 1931 … C’est donc en tant « qu’embryon » que s’effectue ma première traversée de l’Atlantique ! Préfiguration ?

Bacs en poche, 3 ans de Grand Séminaire à Rouen, une année à la « Corniche », classe préparatoire au concours d’entrée à Saint Cyr. Echec. Je suis sans travail ! Le Directeur Commercial d’Air France est alors M. Henri, un ancien de la Transat où travaille mon père. Ce dernier me conseille d’aller le voir. « Montée » à Paris, rencontre, inscription au concours PNC. Le 14 septembre 1955, j’entre en stage. Cinq semaines après, je suis devenu steward et, par la suite, Chef de Cabine, Instructeur (sol et vol), Chef Steward et enfin Chef PNC.

A chaque étape, échoient des tâches spécifiques. Je vole sur DC4, Vickers Viscount, Constellation, Super-Constellation, Caravelle, B707, B747 et B727. Animateur à la Section de Formation du Personnel, je peux donner libre cours à mon imagination créatrice. Le 1er juillet 1973, je suis affecté à DK.TV pour créer les méthodes de service et le traitement des futurs passagers « Concorde » et ce, sous l’autorité de M. Courgeon, Chef PNC.

Débute alors « La grande aventure »

Pour pallier aux commandes envolées, Sud Aviation veut « montrer cet avion » au monde entier, tout en poursuivant les essais qu’appelle la Certification. Air France est sollicitée pour apporter son aide. Le Concorde N°02, F-WTSA, avion de présérie assurera cette mission. 32 sièges permettront d’accueillir les hautes personnalités et les « décideurs ». L’équipage PNC est composé d’un Chef de Cabine (je suis prêté par Air France), de deux hôtesses et d’un steward (tous trois de Sud Aviation). PNT et PNC sont très motivés. Ambiance extraordinaire. Le WTSA va se poser maintes fois à Rio, vivra une campagne de froid à Fairbanks, transportera le Shah d’Iran à Téhéran et « ouvrira » l’aéroport de Dallas, au Texas. A l’atterrissage à Dallas, sur les taxiways, nous sommes accompagnés ! A bâbord, cow-boys et chariots, à tribord, indiens emplumés sur leurs chevaux fougueux ! C’est une image que je ne peux oublier. Au retour de Dallas, je suis Chef de Cabine pour la première traversée de l’Atlantique Nord à Mach 2. Ce Washington – Orly du 26 septembre 73, est un vol historique qui montrait que le pari Concorde était en passe d’être gagné.

Tous ces vols me permettent de me familiariser avec ce nouvel aéronef. Cette expérience m’amènera à concevoir un service totalement différent de celui offert sur les autres avions. Agréé par la DG, ce service sera offert dès le premier vol commercial Paris – Rio – Paris (21 janvier 1976). Je vais avoir la chance d’assurer les premiers vols commerciaux : Rio – Paris, Caracas, Washington, New-York. Parmi les passagers du premier Paris New-York : M. Bellonte qui, en 1930, réalisa la première liaison Le Bourget – New-York en 37 heures et 17 minutes. Plongé dans ses souvenirs, les yeux fermés, il devait revivre cette traversée historique. Il ne but qu’un verre d’eau et demanda « qu’on ne s’occupe pas de lui ». Je vis une aventure sans pareille : plus je vole sur cet avion, plus je m’y attache. Il est devenu « mon bébé ». C’est le « Bel Oiseau Blanc ».

Nommé Chef de Division, Chef PNC, je ne vole plus sur Concorde. Néanmoins, on me confie l’ouverture de la desserte Mexico. M. Peyrol, Directeur Général me charge de la préparation d’un vol présidentiel à destination de Washington. Je vais donc à l’Elysée participer à deux réunions de travail. Exigences, parfois paradoxales des « grands de ce monde » : il faut prévoir un lit dans la cabine avant … pour un vol de 4 heures. Air France intègre la demande et donne satisfaction : son honneur et celui de Concorde sont en jeu !

Je quitte la Compagnie le 1er juin 1982. Concorde « me colle à la peau ». A mon tour, je vais le faire connaître en donnant des conférences dans les centres culturels, au Rotary etc. à Roubaix, Rochefort, La Rochelle, Bordeaux … je veux partager mon amour pour « l’Oiseau Blanc », voir les gens écouter et découvrir cette aventure fantastique : « 100 passagers, sans masques, transportés à 18000 mètres, plus vite que le soleil ! »

Claude Monpoint
9 janvier 2021